Pour sa rentrée, la chambre sociale de la Cour de cassation a apporté des précisions essentielles sur la promesse unilatérale de contrat (Cass. Soc. 21 septembre 2017, n°16-20.103). Elle offre plus particulièrement une relecture de la promesse d’embauche à l’aune de la réforme du droit des contrats.
Mais quels enseignements concrets peut-on tirer de cette décision ?
Le visa prometteur de la décision
Le visa de la décision rendue par la Cour de cassation offre d’emblée une belle promesse : celle de la rencontre entre le droit commun des contrats et le droit du travail. En effet, cette décision, a été rendue à la lumière d’une lecture combinée de l’ancien article 1134 du code civil et de l’article L 1221-1 du code du travail.
Le premier de ces textes constitue la clef de voûte du droit des contrats à travers la notion de force obligatoire. Le second témoigne de l’influence du droit commun sur le droit du travail et dispose, notamment, que « le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun ».
Ainsi, la relation entre le droit commun et le droit du travail, tantôt de répulsion, tantôt d’attraction, trouve dans la présente décision une illustration fort intéressante (pour une analyse de cette décision sous l’angle de la relation entre le droit commun des contrats et le droit du travail voir Bérénice Bauduin, Julien Dubarry, Fallait-il lire les promesses d’embauche au prisme du nouveau droit commun des contrats ?, Recueil Dalloz, 2017, p. 2289).
Les effets de la réforme du droit des contrats sur la jurisprudence
« Attendu que l’évolution du droit des obligations, résultant de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, conduit à apprécier différemment, dans les relations de travail, la portée des offres et promesses de contrat de travail (…) ».
A travers cet attendu de principe, la chambre sociale annonce sa volonté d’opérer un revirement afin de mettre sa jurisprudence en conformité avec les dispositions réformées par l’ordonnance de 2016. La réception par la Haute juridiction de ce texte et son influence sur sa jurisprudence est particulièrement scrutée ces derniers mois. En particulier, lorsque la jurisprudence antérieure à la réforme ne s’inscrit pas dans la ligne des nouvelles dispositions. Tel est bien le cas pour la jurisprudence en matière de promesse unilatérale, qui se démarquait de l’actuel article 1124 du code civil.
En l’espèce, la Haute juridiction ne méconnaît pas le principe de non-rétroactivité de la loi, comme en témoigne l’application de l’article 1134 dans son ancienne rédaction. Mais elle opère toutefois un revirement sous l’influence de la loi nouvelle.
La distinction opérée entre offre d’embauche et promesse d’embauche
La rétractation de l’offre d’embauche ne conduit pas à la formation du contrat.
Dans une formulation relativement pédagogique, la chambre sociale prend soin de souligner que l’acte « par lequel un employeur propose un engagement précisant l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction et exprime la volonté de son auteur d’être lié en cas d’acceptation » constitue une offre de contrat de travail.
Une fois cette précision apportée, la chambre sociale indique que cette offre, au regard des dispositions nouvelles, peut être librement rétractée tant qu’elle n’est pas parvenue à son destinataire. En revanche, la rétractation d’une telle offre avant l’expiration du délai fixé par son auteur ou, à défaut, à l’issue d’un délai raisonnable, fait alors obstacle à la conclusion du contrat de travail. Dans cette hypothèse, seule la responsabilité extra-contractuelle de l’auteur peut être recherchée : le contrat n’est pas formé.
Mais, au contraire, la révocation de la promesse unilatérale n’empêche pas la formation du contrat de travail.
« En effet, la chambre sociale rappelle dans la présente décision que doit être définie comme une promesse unilatérale de contrat de travail « le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat de travail, dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont déterminés et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire ».
Dès lors, influencés par les nouvelles dispositions du code civil, les magistrats de la chambre sociale considèrent que la révocation de la promesse, intervenue durant le temps laissé au bénéficiaire pour lever l’option, ne peut empêcher la formation du contrat de travail. Par conséquent, une fois la promesse consentie, la formation du contrat se trouve uniquement suspendue à la volonté du bénéficiaire.